Voilà encore une bien jolie découverte que ce livre, dont je ne saurai vous dire s’il m’avait été offert par ma bonne fée ou si je l’avais acheté, tant j’ai pris de retard sur ma pile de livres à lire et ce n’est pas peu dire…
Ce court roman (moins de cent pages) nous plonge dans l’atelier surréaliste et poétique d’un taxidermiste du souvenir. Vous possédez quelque objet de l’ordre de la madeleine de Proust ? Vous avez dans vos tiroirs un souvenir impalpable de l’ordre de l’olfactif ou de l’harmonique ? Cet étrange conservateur le rendra inaltérable en le transformant en spécimen afin de vous permettre de clore un chapitre de votre vie pour enfin avancer : « Parce que le sens de ces spécimens est d’enfermer, séparer et achever. »
Sous une apparente légèreté, rien n’est laissé au hasard dans ce roman. Puisqu’il s’agit du souvenir, de la nostalgie et de la dépendance sentimentale poussée à son paroxysme (le sacrifice contre l’oubli), tout, du lieu et de ses locataires (un ancien foyer de jeunes filles encore partiellement occupé par de curieuses vieilles dames), en passant par le choix du membre mutilé de la jeune employée (l’annulaire), jusqu’au fétichisme du cadeau de l’amant, tout est chargé de symbolisme et nous renvoie au sentiment.
Je parle bien de sentiment et non d’histoire amoureuse puisque, de plus, la relation entre les deux protagonistes est aussi froide que le carrelage de la salle de bain où ont lieu leurs ébats, ce qui, là encore, démontre la finesse de chaque petit choix dans cette écriture qui, tel un film de Chabrol, nous invite subtilement à un second niveau de lecture.
En résumé, je ne dirai pas que « L’annulaire » est une œuvre majeure de la littérature japonaise mais loin de le mettre à l’index, je vous recommande chaleureusement d’en tourner les pages du bout des doigts (je n’ai pas pu résister, je suis bien moins subtile que Yoko Ogawa).
On me souffle dans l’oreillette qu’il y aurait une adaptation cinématographique
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déjà lu… Superbe !!
Je serais ravie d’en discuter plus avant avec toi, car franchement, j’ai du me retenir dans mon envie de partager mon analyse, de peur de trop en dire et donc de gâcher le plaisir de futurs lecteurs…
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