
Transformation inconnue
Il faut accepter d’aller voir au fond, tout au fond.
Il faut aller voir dans la commode, vider tous les tiroirs au sol et fouiller dans le bordel accumulé depuis des décennies.
Il faut le regarder bien en face, ce bordel, déplier ce que l’on a jeté en boule, bien caché-planqué, au fond, tout au fond.
Il faut y plonger la tête la première sans avoir peur de s’y noyer.
« Ne sais-tu donc pas nager ? »
Parce qu’il faut nager, au fond, tout au fond, histoire de remonter.
Il faut aller voir dans la commode tout ce que l’on a rangé-oublié dans les tiroirs durant des années.
Il faut comptabiliser les chaussettes esseulées, abandonnées, contempler les tissus troués-déchirés et jamais raccommodés.
Il faut se souvenir de pourquoi, de comment, quel geste, quel accro, ce qui les a défoncés-malmenés-abimés.
Parce qu’une commode est commode pour empiler, une commode, c’est commode pour oublier ce qui est glissé, là, sous la pile des jolies robes colorées et bien pliées.
Il faut s’y confronter à cet amas de merdier, il faut le trier, faire place, faire de la place, le transformer.
Et surtout, oui, surtout, ne pas avoir peur de le transformer, le découper, le jeter, s’armer d’une paire de ciseaux et d’une paire de…c…
…courage et s’interroger : « Est-ce que la chenille a parfois peur de l’inconnu avant d’entrer dans sa chrysalide ? »