Tu es là à te réjouir de ce jour béni du déconfinement.
Tu es là, heureux, dans toute ta gloire joyeuse à vouloir festoyer, parfois même un peu avant et, bon sang, comme je te comprends.
Mais tu oublies qu’il s’agit là d’un déconfinement partiel, un timide pas en avant.
Tu oublies que, pour beaucoup, c’est encore le temps du confinement : artistes, restaurateurs, propriétaires de ces bars où tu aimes tant aller boire, tous attendent encore patiemment…
Tandis que tu es en liesse, eux, attendent sagement. Anxieusement et sagement…
Trois semaines, trois petites et longues semaines entre tes mains, entre nos mains, entre les mains de chacun, trois semaines en apnée avant d’être vraiment délivrés.
Entre nos mains, il y a leur nez en apnée.
Parce que de ton sérieux, de mon sérieux, de notre sérieux à tous et à chacun, s’aplatira cette fameuse courbe dénuée de toute sexualité (eh, je sais, lecteur célibataire confiné, combien tu as faim et combien, de ce fait, tout revêt vite une nudité hypersexuée, ne le nie pas, je le sais).
Et, peu importe de savoir si ces mesures sont justes, justifiées, exagérées… peu importe les théories du complot ou ultracrépidarianisées, peu importe les nobélites et les Dunning-Krugger effets, ces mesures sont là et, si la courbe asexuée ne redescend pas, les décisions contrariantes vont tomber : point de réouverture, point de concerts, point de verres partagés hors des limites de ton chez toi, de mon chez moi.
Alors oui, lecteur impatient de retrouver ce que tu aimais, pense que trois petites semaines, le temps d’un « laisser et voir », c’est aussi le temps de ne pas ruiner tous tes espoirs de retrouver cette liberté qui t’a tant manqué. C’est éviter que le déconfinement ne se transforme en déconfiture amère et frustrée.