La contorsion du chignon (plaisirs inavouables 1/2)

La contorsion du chignon - Infographie par La Vilaine

Je ne suis pas une grande amoureuse du ménage mais il faut le faire, je m’y plie donc de bonne grâce et m’attaque aux taches tenaces et rangements divers, panossage (oui, ici, on dit panosser, n’en déplaisent à mes amis parisiens, je suis parfaitement intégrée et use du patois avec doigté) et pliage des vêtements d’hiver, toutes ces besognes m’ayant été attribuées par un tirage au sort auquel je ne me souviens pourtant pas avoir jamais participé. Pour faire court, bon gré mal gré, et puisque j’y suis obligée (depuis que j’ai compris que non, Mary Poppins ne viendrait jamais faire mon lit), j’y mets de l’entrain et passe l’aspirateur sur de rythmés refrains.

Mais parmi toutes les corvées chronophages du quotidien, il y en a quelques unes qui me réjouissent au plus haut point. Oui, je m’apprête à vous livrer par le truchement de ce billet, une petite passion inavouable, un plaisir parfaitement démesuré, voire même deux (j’hésite un peu), et ce, en toute conscience…

Offrez-moi un meuble Ikéa et vous me comblerez de joie. Pas particulièrement pour le design du mobilier sans âme, j’aurais plutôt un certain amour pour l’objet qui sent le vécut (et la poussière, mais sur ce sujet, vous m’avez déjà lue), non, non, c’est pour le côté en kit… Le montage d’un Kinder Surprise obèse provoque en moi des soupirs d’aise. Je pourrais passer mes journées dans des positions aussi improbables qu’inconfortables, affalée sur le carrelage du salon, à jouer de la clé Allen, à me contorsionner jusqu’au chignon, à visser à en perdre haleine… Et si par hasard il manque une pièce, je ne grogne pas, je ne suis plus que liesse face à ce petit ennui qui vient heureusement compliquer le défi. Je suis assez lucide pour que, tout en taquinant le tournevis, je prenne pleine conscience de mon vice, et me moque de ma sur-réaction pleine d’effusions.

Car non, lecteur, il ne s’agit pas uniquement de « bien aimer » les monter, mais bien d’un véritable plaisir à la limite du délire… Tant et si bien, que l’année dernière, loin des bijoux et autres fanfreluches de femmes de goût, j’ai réclamé pour fêter mon anniversaire, une perceuse-visseuse-dévisseuse-rêveuse, à la lumière toute nucléaire, pour m’enfoncer dans ma passion vicieuse et tenter de gravir quelques échelons de la bricoleuse à hyper-réaction…

Et de me demander, si, au lieu d’un travail requérant l’entière participation de mon cervelet, je n’aurais pas plutôt mieux fait, de m’orienter vers quelque métier nécessitant la dextérité de mains tannées.

Homme de Ménage Nu !

aspirateurMême avec la meilleure volonté du monde, je dois l’avouer, il devient de plus en plus difficile de conserver ma maisonnette proprette tout en m’aménageant un minimum de temps pour des fioritures jouissives, vitales et salvatrices. Fortement réticente à l’idée de confier une part de ce que je me faisais un devoir de réussir à concilier, j’ai finalement laissé l’idée tapoter à la porte de mon cervelet fatigué et me suis mise en quête de la perle rare, celle qui me permettrait de ne plus dépenser mon énergie de fin de semaine dans ce que l’on nomme communément : les tâches ménagères…

Mais voilà, pour me procurer ce luxe (car admettons-le, le luxe c’est le temps disponible non pas pour la publicité, n’en déplaise à Monsieur Lelay, mais pour la vraie vie) inconnu, il me fallait me forger une culture sur le sujet. Tarifs, expérience recommandée, nombre d’heures possibles sans que mon banquier s’étouffe, mode de règlement, j’avais tout à apprendre. Et quoi de mieux qu’Internet pour avaler goulûment ces informations ?

Passées les premières minutes d’hystérie joyeuse en découvrant les facilités offertes par les sites professionnels, les tarifs proposés ont vite eu raison de mon optimisme… 21 € de l’heure en moyenne, ce n’était aucunement le budget qu’escomptait mon naïf raisonnement. Fi donc des sites professionnels, vive les moteurs, cherchons, cherchons, les tarifs en vigueur…

Et là, quelle ne fut pas ma surprise de découvrir l’existence de l’Homme de Ménage Nu ! Oui mesdames et messieurs, la particularité de l’Homme de Ménage Nu est qu’il vient chez vous GRATUITEMENT à la seule condition de pouvoir s’acquitter de son travail en tenue d’Adam sous vos yeux ébahis ! Pensant d’abord à un cas isolé, un exhibitionniste en mal de voyeuriste, j’ai rapidement constaté d’un clic à l’autre, que cette pratique est fort répandue et que la ménagère est ravie des services offerts ! Je dois confesser la tête baissée sur mes souliers 35 fillette, que devant la liberté tarifaire (je dis bien tarifaire, croyez quoi ?) de ce service, je n’ai pas rejeté immédiatement l’idée… Oui j’assume avoir pensé que les bourses déliées de cet homme de ménage soulageraient la bourse du mien (de ménage) et raviraient par conséquent mon banquier.

Et puis la raison est revenue, et pensant à cet homme tout nu portant des gants Mapas et jouant du plumeau dans les recoins de ma maisonnée, j’ai eu les plus grands doutes sur ma capacité à ne pas décéder des suites d’une fulgurante crise de rire (ou de panique) si ma voisine octogénaire venait à passer chercher sel ou œufs durant les heures de travail de mon homme de ménage et ai finalement renoncé à cette drôle d’idée.


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