Un coup de cul dans l’eau

en secouant quelques arbres, jai tout de même ramassé quelques pommes

Si être publiée est une expérience riche en patates, la suite de l’aventure est un gratin dauphinois oublié dans le four, et je m’en vais vous en conter la recette…

Il n’est en effet pas aisé de promouvoir ses écrits, fussent-ils édités par le truchement d’une maison d’éditions, et votre Vilaine en fait l’expérience à la fois enrichissante et quelque peu désappointante. Car le lecteur est frileux et se dirige l’œil fermé et l’instinct annihilé droit vers les conseils médiatisés, or, le média, tout coincé qu’il est par les budgets publicitaires, se doit de promouvoir sans risque pour attirer le chaland et présente donc des auteurs déjà médiatisés. Et voilà comment le livre se mord la couverture !

Peut-être aurais-je du passer par une émission de téléréalité, écrire sur un sujet d’actualité, surfer sur les vagues du scandaleux, dessiner les courbes d’un régime douteux, diffuser des auto-portraits sulfureux, et mettre ainsi toutes les chances de mon côté pour offrir à mes nouvelles un brin de notoriété. Non, fidèle compagnon de ma Toile de déraison, telle n’est pas ma nature, ce n’est pas la gloriole qui me meut, mais bien la passion ! Alors, j’ai remisé les décolletés outrageux au placard et rejeté le buzz au profit des petites histoires qui m’animent.

Seulement voilà, quand on a écrit, c’est un peu idiot, allez savoir pourquoi, mais une envie d’être lue trotte-menu malgré tout dans un coin de la tête, tant et si bien, que même si l’on se contre-fout de la renommée, on finit immanquablement par chercher à faire tomber les fortifs des médias et des librairies qui ne nous distribuent pas. Et votre Vilaine ne serait pas ainsi nommée, si elle n’était pas quelque peu prête à faire sa radeuse, au moins pour ce en quoi elle croit… Alors, elle tente, elle toque à des portes avec toute sa naïveté, elle gratouille les flancs des gens qu’elle aime bien, elle s’enfonce dans les girons des bonnes publications, en se chantant que sera, sera…

Oui, contre vents et marées, j’ai entrepris d’user et d’abuser et de proposer l’envoi de cet ouvrage aux libraires que j’estime, aux journalistes que j’admire, du plus petit au plus gros rien n’arrêtera mon culot ne fut-il au final qu’un coup de cul dans l’eau !

(Et si vous êtes sages, je vous raconterai dans un prochain billet, qu’en secouant quelques arbres, j’ai tout de même ramassé quelques pommes…)

Au théâtre ce soir…

Les enfants courent à petits pas nus sur le carrelage, goûtant la seule source de fraîcheur dans la lourdeur de la soirée, le clapotis de leurs pieds mignons à peine masqué par la voix chuchotée de leur mère. La journée a été rude et pesante, pas un brin d’herbe n’a frémit, même les oiseaux se sont tus comme harassés eux aussi par le ciel accablant.

Petite fille au doudou Infographie par La Vilaine

Petite fille au doudou Infographie par La Vilaine

Le doudou sous le bras, le pouce dans la bouche, traînant de petites couvertures toutes douces pour créer un petit coin douillet sur les coussins déjà amoncelés sur le sol, les petits s’installent frénétiquement, cherchant un peu ensommeillés la meilleure place pour le spectacle promis. Les voilà attentifs, tous sens en éveil, les yeux écarquillés, guettant devant la baie vitrée le signal du lever de rideau. Car ce soir, nul livre, nul programme télévisé ne saurait rivaliser avec la magie qui se prépare, car ce soir c’est une représentation unique, les marmots vont au théâtre ce soir. Ils ont veillé pour attendre la nuit, ils ne trouvaient de toute façon pas le sommeil dans la moiteur des draps, tournant et se retournant dans leurs petits lits à barreaux, sortant une jambe, un bras pour tâter un peu d’air, chouinant à moitié jusqu’à ce que Maman vienne les délivrer de leur prison de touffeur.

Mais voilà que les martinets se taisent, leurs cris ne percent plus le ciel, signe incontournable que tout va commencer, on éteint toutes les lumières, on se pelotonne les uns contre les autres, on grignote des petits gâteaux.

Leur mère les fait taire, il faut écouter et regarder. Le premier éclair déchire le ciel, les ineffables lumières révèlent les nuages dissimulés par la nuit, la marmaille retient son souffle et guette d’un oeil brillant le regard de Maman. D’un sourire elle les rassure, oui, le spectacle a commencé, écoutons à présent le roulement du tonnerre. Mais il faut compter, mes chéris, compter les secondes entre éclair et tonnerre et vous saurez à quel endroit il est.

Et dans le noir le plus total, attendre à présent les premières gouttes de pluie salvatrice qui de quelques unes deviendront plusieurs, puis grosses, puis le déluge qui fera trembler le toit de la véranda dans un bruit assourdissant de tam-tam. Guidée par leur mère, la marmaille applaudira, sautera, dansera pour célébrer comme il se doit la féerie de la vie.

Enfin, l’orage s’en ira, la mère ouvrira toute grande la baie vitrée pour faire entrer le frais, l’odeur de l’herbe rincée par la pluie et de toutes les fleurs qui par la magie de cette ondée exhaleront leurs parfums comme à nul autre moment.

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