Ô Voleur !

wanted

On m’a volée…

Une lectrice vient de m’en informer. Elle avait suivi mes recommandations, m’avait montée non pas sur le bar mais sur une table de snack et elle m’avait laissée là le temps de soulager sa vessie (par prudence ou par pudeur elle avait choisi de ne pas m’emporter durant sa pause pipi, je l’en remercie même si je l’avais dit : je ne crains pas d’être un peu salie mais bon, c’est vrai, tout dépend par quoi).

Lorsqu’elle est revenue, je n’étais plus là. Un voleur-lecteur (ou était-ce un lecteur-voleur ?) m’avait enlevée, kidnappée, subtilisée, volée. Ma lectrice en a été fort fâchée et moi, sur le moment, bien désolée.

Et puis, l’instant d’après, j’ai conciliabulé avec moi-même : qu’est-ce qui a pu pousser quelqu’un à piquer « Les fleurs roses du papier peint » ? Ce n’est tout de même pas un acte anodin, il se pourrait bien que ça en dise plus que l’histoire d’un simple larcin…

Parce que, tu me l’accorderas, voler un livre n’est pas si commun. Généralement ce sont plutôt portefeuilles et sacs à main qui sont visés, ou encore portables et menue monnaie. Rien que ça, ça me bloque un peu l’amertume et la rancoeur.

Sans compter que c’est un peu flatteur : j’ai fait envie…

Mon livre, son titre ou sa couverture, quelque chose de tout ça a suffisamment provoqué le désir de quelqu’un pour qu’il décide de se l’approprier à la dérobée.

À moins…

À moins qu’il ne s’agisse plus tristement d’un comportement compulsif ou, pire ! d’un manque de papier pour… qui sait ? ce qui plus haut a été évoqué… auquel cas j’espère au moins qu’il m’aura un peu lue avant de m’utiliser.

Et si par hasard, Ô lecteur-voleur, tu passais par là, oseras-tu me dire pourquoi ?

 

 

Le retour des martinets

J’étends mon linge dans les dernières heures de ce soleil estival, comme toujours durant ces tâches, mon esprit se détache vers d’autres pensées que celle de mes mains qui déploient les vêtements avec soin pour éviter autant que possible la corvée du repassage. Un bruit me sort de ma torpeur, me fige sur place, j’écoute sans respirer comme si la moindre prise d’air était susceptible de rompre mes chances de saisir à nouveau ce son tant attendu. A nouveau il transperce le silence, des sifflements stridents comme un cri percent le ciel. Mon visage s’éclaire, mes yeux s’écarquillent, je ne suis que trop familière de ce chant annonciateur des beaux jours.

Une immense joie m’envahit, une joie d’enfant, une hystérie bienveillante ! En un saut j’enjambe le pas de porte pour me retrouver au milieu du jardin, je cours, je tourne, je virevolte la nuque renversée pour les apercevoir, j’ai le vertige et je m’en moque, je veux les voir car leur passage est furtif et fou. Enfin les voici, dans leur course impétueuse, leur joute aérienne qu’ils renouvelleront chaque soir au coucher du soleil, et je me bercerai du doux rêve que ce n’est que pour me saluer moi, que leur vol m’est dédié à moi qui les écoute en frémissant. Ils sont revenus les martinets de mon jardin, leur ponctualité m’enchante, nous sommes bien en mai puisqu’ils sont là.
Jeune Martinet tombé du nid

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