D’improbables probabilités

Une vieille copine

« Je ne crois pas aux rencontres fortuites (je ne parle évidemment que de celles qui comptent) » écrivait Nathalie Sarraute dans Martereau. Moi non plus. Et encore moins lorsque les probabilités sont aussi peu de leur côté…

Avant d’aller revoir la mer, j’ai, cher lecteur, rendu visite à ma vieille amie en fer. Un retour dans les rues où j’ai vécu de très belles années, où j’ai habité, fait mes études, travaillé, fait carrière, traîné dans tous les musées des journées entières, festoyé dans les bars qui ferment très tard voire ne ferment jamais.

Comme à chaque fois que je retourne sur mes pas, j’ai eu la sensation que Paris me reprochait de l’avoir abandonnée, oubliée, trompée. Alors j’ai mouché les bateaux et absorbé l’air pollué comme s’il était chargé de tout mon passé. Une promenade sur les Champs dans ce brouhaha auquel je ne suis plus habituée pour me souvenir qu’observer autant de passants, en passant, c’est inspirant. Ce sont autant de petites histoires que l’on peut se conter à part soi à partir d’un mot, d’une phrase, attrapés à la volée.

Mais revenons-en à nos probabilités (seule partie des mathématiques qui ont su me séduire durant ma scolarité) : à un moment donné, il faut bien manger. On choisit un restaurant, il est complet, alors on se dirige sans conviction vers celui d’à côté, on s’installe en terrasse (pour bien profiter de la masse, de ces gens, de ces bruits, de ce grouillement). Une serveuse prend la commande avec l’air renfrogné tout parisien qui nous aurait presque manqué. Et l’on observe à nouveau les badauds, les attablés, les pressés et ceux qui tiennent les murs comme on dit dans la banlieue où je suis née.

Un regard, un visage, là, à la table juste à côté. Un doute… Quinze ans sont passés… Puis la certitude. Juste à côté de moi, une amie, une collègue, celle qui m’a inspiré Delphine et sa phobie particulière déjeune en bavassant les mains virevoltant dans les airs. Alors on se penche vers elle sans piper mot, on attend qu’elle se tourne avec amusement, on se demande si elle nous reconnaîtra… Quinze ans sont passés.

Reconnaissance immédiate ! Voilà qui rassure sur le poids des années ! Incrédulité des deux côtés, comment ?! Quelles probabilités ? Tu n’es là que pour une journée ? En quelques minutes on résume une vie, quinze ans sont passés…

« Je ne crois pas aux rencontres fortuites (je ne parle évidemment que de celles qui comptent) » écrivait Nathalie Sarraute dans Martereau. Moi non plus. Elle m’a inspirée Delphine, je lui dois ma première édition… Je la croise alors que je viens de trouver le courage d’écrire tout un roman. Une nouvelle boucle est bouclée.

Déconfiture et du miel

peaux d'orange

Peaux d’orange

Parce que j’avais promis de vous tenir informés de chacune des avancées de mon nouveau projet, il me semble nécessaire de vous faire part avant tout du retour d’expérience KDP (entendez : Kindle Direct Publishing cet outil relativement facile à utiliser pour s’auto-publier numériquement).

Et point d’avis tranché même avec le fil d’un rasoir, non, rien n’est tout blanc ni tout noir, je vous présente un bilan mitigé façon thèse, antithèse et synthèse. Oui, KDP a du bon puisqu’il me permet de rencontrer de nouveaux lecteurs (enfin moi non, mes nouvelles, oui. Pour ma part je n’ai pas bougé la moindre partie de mon fessier tandis qu’elles sont allées chez les uns et les autres, ajoutant à leur expérience d’objets consommés quelques consommateurs de plus que ceux glanés dans leur version papier).

Mais KDP a aussi ses faiblesses et notamment celle de ne pas offrir plus d’outils promotionnels sur la plateforme française (pour les US, c’est corne d’abondance publicitaire) ou encore celle de dépendre terriblement du retour des lecteurs. Je m’explique : la visibilité dépend avant tout du nombre de lecteurs ayant eu le temps (et la gentillesse) de venir noter et commenter l’ouvrage. Pensez donc que pour un tout petit auteur face à de gros mastodontes de l’édition, même bien motivé, c’est plutôt complexe (commente petit lecteur ! commente !).

Cependant, les quelques lecteurs qui m’ont fait l’honneur de noter et commenter mes nouvelles (parfois l’une, parfois les deux) m’ont réchauffé le coeur à une température inégalée jusque là (et le réchauffement climatique devient numérique). Merci, merci, merci… Vous avez aimé (dois-je conclure que ceux qui n’ont pas commenté ont détesté ?). Tout ceci m’a aidée, vraiment aidée.

J’ai donc terminé ma grosse nouvelle nouvelle (115 000 signes) plus vite que je ne l’aurais pensé et écumé les maisons d’éditions en commençant par les étudier car celles qui acceptent les nouvelles sont aussi rares que les femmes à barbe et que j’ignorais à peu près tout de « comment et à qui envoyer son tapuscrit » jusqu’ici, ma seule expérience de publication s’étant faite à l’envers (la maison d’éditions m’avait contactée pour me demander si, toutefois, je n’avais pas des nouvelles à leur proposer). Et parmi celles qui les acceptent, j’ai découvert qu’elles sont nombreuses à n’accepter que de l’inédit (autant dire que « Quand je serai vieille » et « Une phobie particulière » déjà publiées par Léda en 2011, puis en 2016 en e-book sont hors jeu dans ce cas de figure), l’idée d’un recueil proposant les trois nouvelles a donc volé en éclat pour toutes celles-là.

Après ce premier passage à l’écumoire, la liste des possibles s’est donc réduite à quelques noms. J’ai alors opté pour les maisons d’éditions qui m’ont paru avoir un catalogue proche de ce que j’aime en tant que lectrice et correspondant à mon sujet. Là encore, une petite déconfiture lors de la lecture des accusés de réception, délai de réponse : 3 à 6 mois (patience et longueur de temps font… pas mon fort). Je suis de ces êtres qui peuvent croire en eux par accident, rarement sur bien longtemps alors ,forcément, tout ce temps devant moi, c’est un coup à ce que je perde confiance.

Et puis, entre deux déconfitures, alors que je commençais à me dire « Ma petite Vilaine, renonce ou auto-édite, que crois-tu donc ? » j’ai osé me tourner vers l’admirable et talentueux Éric Poindron pour lui demander de me dispenser quelques conseils et, surtout, des pistes de maisons d’éditions et il a été la cuillère de miel inattendue en me proposant de me lire, en me téléphonant et en m’offrant déjà quelques pistes pour la construction d’un recueil.

« Le chemin est long du projet à la chose » mais le chemin est bon lorsqu’il est jonché de cuillères de miel entre deux pots de déconfiture…

 

Je commence par la fin

Grande nouvelle ou petit roman

Grande nouvelle ou petit roman

J’ai bénéficié d’un joli temps, un temps entre parenthèses, plus calme professionnellement. Quelques jours pour avancer à pas de géant sur ma grosse nouvelle, mon petit roman.

Je sens que le moment arrive, celui qui me rapproche peu à peu de la fin de l’histoire, une fin que je connais déjà depuis longtemps puisque c’est elle qui a motivé les premières lignes. Je commence par la fin… dans ma tête uniquement.

Alors, même si je connais la fin et que le plus gros de la tâche consiste à en créer le début, à l’entremêler à un doux milieu qui conduise plaisamment vers elle, je sens mon coeur qui palpite plus intensément à chaque mot tapé dans un mélange indéfinissable de légère peur, d’excitation, de nostalgie et autres bizarreries.

Je commence par la fin… dans ma tête uniquement et à mesure qu’elle approche je m’interroge sur une autre fin, celle à laquelle est destiné cet écrit : s’il emportera l’enthousiasme des lecteurs, celle d’un éditeur, ou si je tenterai de concrétiser un projet fraîchement germé dont l’originalité risque de déstabiliser mais de m’offrir l’opportunité de monter dans un ascenseur émotionnel encore inexploré (et aussi d’en tomber).

Je commence par la fin… dans ma tête uniquement et en attendant de vous la livrer, je vous remercie à nouveau pour la motivation que vous me donnez lorsque, chaque jour, je constate que vous commandez les nouvelles déjà publiées

 

 

Sous ton oreiller

bonne lecture

Vous êtes 10, déjà 10, en moins d’une petite semaine, à m’avoir achetée.

Enfin, pas moi (et c’est tant mieux), mais un peu de moi et même si pour bon nombre d’yeux ça n’a rien de bien glorieux, je vis ce petit bonheur déjà vécu il y a quelques années avec la version papier, ce petit frisson, cette douce sensation de m’être glissée là, sous ton oreiller à toi, à toi et aussi, c’est probable, à toi… Je suis là, donc, moi, bien calée entre vos mains, vous, tête un peu décoiffée, à me lire et me décrypter depuis cet oreiller que j’imagine épais et douillet, vous passez un moment (je l’espère réjouissant) en ma compagnie et j’en suis tout ébaubie.

Alors, bien sûr, j’ai conscience que pour des raisons de commodités, si ça trouve, ce n’est pas depuis votre oreiller que vous me lisez. Il n’est pas impossible que vous trôniez (et ce peu de moi avec) dans un lieu un peu moins honorable avec un tout autre genre de papier à proximité (ne vous inquiétez pas, je ne vous vois pas). Mais que voulez-vous, mon imaginaire sans doute un peu trop romanesque vous songe allongés ou semi-assis, trois oreillers sous les lombaires avec une douce lumière.

Quel que soit le lieu, merci à toi, à toi et puis à toi, aussi.